J'ai habité à Saint-Philippe pendant une dizaine d'années. Par un après-midi du mois d'août 2007, je vis passé ce camion devant le bureau de poste, sur la route Édouard VII. Je couru jusqu'à chez moi, attrapai mon appareil photo et revins tirer quelques clichés du poids lourd.
C'était un semi-remorque transportant une paire de pales d'éolienne. Le camion roulait sur la route Édouard VII en direction sud. Les camionneurs doivent en général faire preuve d'habileté lorsqu'ils négocient l'intersection de la route Édouard VII avec la montée Monette. Celui-ci a d'ailleurs dû utiliser tout son savoir-faire pour effectuer le virage vers l'ouest. Son atout étant les essieux dirigeables de la remorque. Les véhicules d'escorte bloquèrent d'abord les deux routes. Le camion dépassa l'intersection, poursuivant son chemin en ligne droite. Lorsque les roues de la remorque arrivèrent au niveau du croisement, il fit marche arrière, de sorte que la remorque se retrouve dans le stationnement de l'épicerie du village (première photo).
Pour contourner le poteau électrique planté au coin des routes, le chauffeur dut en plus faire monter le tracteur sur le trottoir. Après quelques manœuvres de va-et-vient, il avait gagné suffisamment de dégagement pour effectuer le virage.
Suite à l'inspection de l'ensemble des ponts et viaducs par le ministère des Transport du Québec (MTQ), les permis de surcharge pour 135 viaducs à risque furent suspendus. C'est possiblement pour cela qu'un chargement de pales d'éolienne a transité par Saint-Philippe. Ce fut le seul qu'il m'ait été donné de voir.
Certaines machines exercent chez moi une fascination
immense. La niveleuse qui paraît sur ces images est un de ces objets de
curiosité. Ces photos ont été prises par ma mère à Pointe-au-Chêne en juillet 1985, alors que nous étions en vacances (c’est moi, assis sur une des roues
de l’engin).
Les niveleuses fabriquées par Caterpillar et Champion dominaient le marché autour de chez moi lorsque j'étais plus jeune. Celle qui figure sur ces photos, en
revanche, est la seule machine WABCo qu’il m’ait été donné de voir de mes
propres yeux. La lame à l’avant et la structure de protection en cas de
renversement ajoutent à l’attrait de la machine. Notez le tuyau d’échappement
incliné à 45°, une caractéristique des niveleuses WABCo, ainsi que les persiennes à
commande hydraulique devant le radiateur, technologie d’une autre époque pour
réguler la température du moteur.
La lame d'une niveleuse, lorsqu'elle nivèle et dirige le matériel vers le côté de la machine, exerce une force latérale considérable. Cette force est parfois suffisante pour faire dévier la niveleuse de sa course. En 1885, Joseph D. Adams inventa un mécanisme
permettant d’incliner les roues des niveleuses, augmentant ainsi leur adhérence
et réduisant la propension de la niveleuse à glisser du côté opposé au talus.
Cette niveleuse WABCo 777 est un modèle antérieur à celui montré plus haut. Avant les systèmes à commande hydraulique, tous les mouvements des niveleuses étaient à commande mécanique. Notez l'arbre de transmission pour la rotation de la lame et le système d'inclinaison des roues avant.
J.
D. Adams & Company fabriqua d’abord des niveleuses tractées avant d'introduire des machines automotrices en 1928 avec le modèle numéro 10. La compagnie fut achetée par
Letourneau-Westinghouse en 1954. Le nom WABCo (acronyme de Westinghouse Air Brake
Company) fut adopté en 1962. American Standard Inc, dans un effort de
diversification, acquit WABCo en 1968. American Standard vendit éventuellement
sa division d’engins de chantier à Dresser en 1984 et la marque WABCo disparut
en même temps. L'héritage de Joseph Adams est encore bien présent aujourd'hui : les niveleuses modernes possèdent toutes un système permettant d'incliner les roues avant.
Après l'effondrement du viaduc de la Concorde à Laval le 30 septembre 2006, le ministère des Transports du Québec (MTQ) fit effectuer une inspection hâtive de l'ensemble des viaducs de la province.
Le viaduc de l'avenue Souligny, au-dessus de l'autoroute 25 à Montréal, fut déclaré potentiellement dangereux. Sa démolition se fit durant la fin de semaine du 15 au 17 juin 2007. Les travaux requérant la fermeture de l'autoroute, le MTQ exigea que la démolition du viaduc et le nettoyage des lieux soient complétés durant le weekend. C'est la firme Excavation René St-Pierre Inc qui remporta l'appel d'offres.
Étant de service le samedi 16 juin 2007, j'en ai profité pour faire un petit détour par le chantier avant de me rendre au boulot. J'y suis également retourné en après-midi avant de rentrer chez moi.
Je n'ai jamais vu autant de machines à l'œuvre dans un espace aussi restreint. J'estime qu'il devait y avoir une vingtaine de pièces d'équipement lourd sur place.
Voir ces machines qui fissurent et broient le béton sans difficulté est un spectacle fascinant. Les excavatrices munies de cisailles s'attaquent aux poutres de béton ou à l'acier d'armature sans sourciller.
Du site émanait un nuage de poussière de béton et un tintamarre de marteaux hydrauliques et de moteurs diesel.
Je réussi à me faufiler au travers des badauds pour prendre quelques clichés. Lors de mon second passage, ne trouvant pas de point d'observation suffisamment rapproché, je marchai dans l'herbe pour me rapprocher du site, jusqu'à ce que l'homme portant le dossard sur la dernière photo s'aperçoive de ma présence. Il m'ordonna alors, d'un ton sans équivoque, de retourner sur la route. Je tentai malgré tout de négocier la prise de quelques photos avec lui mais ce fut sans succès. J'estime avoir tout de même capté l'ambiance du chantier.
Au début des années 2000, l'Agence Métropolitaine de Transport (AMT) exploitait le service de trains de banlieue de la région métropolitaine de Montréal. À l'exception de la ligne Montréal - Deux-Montagnes, qui fut modernisée en 1995, le matériel roulant de l'AMT se composait de locomotives et de voitures d'occasion. J'ai photographié un des trains effectuant la liaison Montréal - Candiac en août 2007 alors qu'il était stationné à Delson durant le weekend, attendant l'heure de pointe du lundi suivant pour reprendre du service. La locomotive est une GP9RM, assemblée en 1959 par General Motors Diesel (GMD) à London, en Ontario. Elle débuta sa carrière pour le Canadian National, tirant des trains de marchandise sur les embranchements secondaires et portait le numéro 4307. Elle fut vendue à l'AMT et remise à neuf aux ateliers de Pointe-Saint-Charles à Montréal en 1990. Lors de la remise à neuf, le capot court fut coupé, afin d'améliorer le champ de vision du mécanicien et du chauffeur. Les bancs de résistances pour le freinage dynamique furent retirés, des prises électriques pour alimenter les voitures (HEP) furent ajoutées aux extrémités du châssis, les systèmes d'attelages automatiques pour convois de marchandise (AAR type «E») furent remplacés par des attelages interverrouillables pour trains de passagers (AAR type «H») et le moteur EMD 16V567C d'origine fut remplacé par un moteur EMD 16V645C, faisant passer la puissance de 1750 à 1800 chevaux vapeur.
Cette locomotive ne possède pas de groupe électrogène pour produire l'électricité nécessaire au chauffage, à la climatisation et à l'éclairage des voitures. Les prises installées lors de la remise à neuf ne servent qu'à faire passer l'énergie d'une extrémité à l'autre de la machine. L'électricité du train est ici fournie par le wagon générateur, attelé derrière la locomotive. Lorsque j'ai pris ces photos, les moteurs diesel de la locomotive et du wagon générateur étaient éteints. Le convoi était alimenté par le réseau de distribution électrique (notez le câble suspendu à un mât pivotant, devant la locomotive), ce qui permet de chauffer / climatiser les voitures et d'alimenter les chauffe-moteurs pendant que le train n'est pas en service.
J'ai aussi pris un gros plan des connections entre la locomotive et le wagon générateur. En plus des câbles électriques, les connections pour la marche en unités multiples (MU) sont aussi utilisées. La dernière voiture du train est équipée d'une cabine de conduite. Plutôt que de retourner le train à la fin du parcours, le mécanicien change simplement de cabine et le train refait le trajet inverse en marche arrière. La locomotive reçoit alors ses commandes d'opération de la queue du train. La locomotive 1311 a pris sa retraite en 2010 et réside maintenant au musée Exporail de Saint-Constant.
À une occasion lorsque j'étais étudiant, j'ai pris le train entre les stations Vendôme et Lucien-L'Allier. C'était en 2000, le train était composé de voitures de la série 800 construites en 1953 par la Canadian Car and Foundry. Elles n'étaient pas équipées de système de climatisation, les fenêtres s'ouvraient pour offrir un peu de ventilation. Le train était tiré par une GP9RM et j'étais assis dans la première voiture, juste derrière le wagon générateur. Les voies montraient des signes de vieillesse et faisaient tanguer les voitures. Le son du moteur de la locomotive était une véritable mélodie à mes oreilles.
Dans la vidéo ci-dessus, deux GP9RM (1311 et 1312) redémarrent après un arrêt à la station Vendôme. Notez les voitures Comet Arrow I-b (celles avec le revêtement en inox) du New Jersey Transit, louées par l'AMT pour palier à une pénurie d'équipement.
Lorsque j’étais jeune,
mon passe-temps favori durant les vacances d’été était l’observation d’engins
de chantier dans leur milieu naturel. J’enfourchais ma bicyclette et partais à
la recherche de zones de travaux où les machines ont l’habitude de se regrouper.
À l’été 1989, la
municipalité de Saint-Hubert octroya un contrat à la firme Désourdy
Construction pour la réfection de certains tronçons de rues situés entre la
Grande-Allée et le boulevard Taschereau, près de l’école secondaire
Mgr-A.-M.-Parent. Le contrat incluait le recyclage à froid de la chaussée. La
photo ci-dessus fut prise au coin des rues Raymond et Grand-Boulevard. On y
voit une recycleuse BOMAG MPH100 en marche arrière, se positionnant pour le
passage suivant. Ces machines, capables de réduire le macadam en gravats,
offrent un spectacle des plus impressionnants. Le rugissement de l’engin et
l’odeur caractéristique de l’asphalte pulvérisée ont laissé en moi des
souvenirs indélébiles. Cette machine appartenait à une autre époque : de nos jours, l'opérateur a droit à une cabine climatisée et isolée du son et des vibrations.
En opération, le moteur
de la recycleuse entraine un tambour muni de dents en carbure de tungstène (à
l’arrière de la machine, sous un bouclier pour prévenir la projection de
gravats) qui brisent le revêtement de la chaussée par abrasion. La BOMAG MPH100 utilise une transmission hydrostatique pour transmettre la puissance du moteur au tambour. Notez, dans la
vidéo ci-dessus, comment la machine se met à danser lorsque le tambour entre
en contact avec le sol. Ces machines sont conçues pour couvrir de grandes
surfaces et par conséquent ne conviennent pas au travail de précision. La
découpe des bouches d’égout et des couvercles de vanne est laissée à des
machines plus agiles ou à des pelles mécaniques. Un opérateur nonchalant est
passé sur un couvercle de vanne alors que j’observais sa monture. La machine s’est
alors mise à sursauter violemment en faisant un vacarme infernal… Réalisant
que quelque chose n’allait pas, l’opérateur stoppa la recycleuse, releva le
tambour et gara l’engin sur une rue adjacente pour évaluer les dommages. Une série de
dents était cassée et dû être remplacée. Contrairement à la machine dans la vidéo ci-dessous, où
le mécanicien peut refaire la dentition du tambour en étant accroupi, sur
la BOMAG MPH100, le mécanicien doit se coucher sous le tambour qui a été
préalablement bloqué en position relevée... La méthode d'extraction et de remplacement des
dents est la même.
La BOMAG MPH100 que j’ai
prise en photo, contrairement à celle de la vidéo, peut aussi servir à la
stabilisation de la fondation de la chaussée. On utilise alors le tambour pour
mélanger un additif au gravier avant l’application de l’asphalte. J’ai déjà vu
ces machines être attelées à une citerne de goudron liquide à l’aide d’un timon
amovible. Un tuyau était alors raccordé entre la citerne et une pompe installée sur
le pare-chocs de la recycleuse. Le goudron circule à l’intérieur du tuyau qui passe du
côté droit du capot et se rend jusqu’au tambour. On met alors en marche le
tambour, la pompe et on ouvre la valve installée juste avant le rail de
distribution qui est monté sur le boîtier du tambour. Le goudron est alors mélangé au gravier mis en mouvement par le tambour. Il ne reste alors qu’à niveler et
compacter le sol avant d’asphalter.
En 1956, Koehring fit l'acquisition de la firme Buffalo-Springfield Company. Cette dernière, spécialisée dans la fabrication de rouleaux compacteurs, devint alors une division de Koehring. En 1957, Karl Heinz Schwamborn fonda la firme Bopparder Maschinenbau-Gesellschaft mbH (BOMAG) à Boppard en Allemagne. Schwamborn est l'inventeur du rouleau compacteur vibrateur à deux tambours motorisés. Il vendit l'entreprise à Koehring en 1970. Peu de temps après, la division Buffalo-Springfield fut rebaptisée BOMAG. En 1980, Koehring fut acquise par Air Movement and Control Association International (AMCA). Northwest Engineering se porta acquéreur de Koehring en 1987. La même année, Terex fut aussi acquise par Northwest Engineering et l'ensemble fut rebaptisée Terex. La division BOMAG fut vendue à SPX Corporation en 2001 avant de passer aux mains du Groupe Fayat de Bordeaux en France, en 2005.